Entre inflation et événements exceptionnels, les occasions de réévaluer les prix se multiplient. Permettant de s’engager durablement malgré ces incertitudes, la formule de révision des prix fournit une solution élégante : modéliser les variations du prix en fonction de facteurs objectifs.
S’il est souhaitable de dédramatiser la volatilité des coûts, la prudence s’impose avant de recourir à cette formule un peu trop magique.
Car les raisons de s’en méfier ne manquent pas :
- Les vendeurs collaborent volontiers à ce type d’approche, voire en sont à l’initiative. Inévitablement, ce sont eux qui fournissent les éléments sur lesquels est construite la règle de calcul. Leur décomposition des prix reflète-t-elle sincèrement leur structure de coût ? Et il y a plus grave : quand bien même elle serait fidèle à la réalité amont, cette conception de la relation nous éloigne subrepticement de la logique du marché aval (celui qui a toujours raison !).
- Ces formules fleurissent classiquement en réponse à un contexte haussier ou à une situation hors normes. Modéliser la dynamique économique à ce moment atypique risque de refléter une situation exceptionnelle et d’en perpétuer les effets.
- Nécessairement simplificatrice, une formule peut englober des réalités non pertinentes. Il lui suffit d’être vraisemblable pour être acceptable et nous faire tomber dans le piège du biais de confirmation. Combien d’importateurs helvétiques ont habilement prétexté de «l’inflation» pour justifier leurs hausses de prix, faisant abstraction de la force inédite du franc suisse face à l’euro ou au dollar ?
Heureusement, il existe des pistes à explorer pour ne plus «attacher son chien avec des saucisses» :
- Rien n’interdit d’indexer les prix d’achats sur le marché aval. Ainsi, ce producteur d’aluminium vient de contractualiser un calcul de son prix d’achat d’électricité basé non plus sur les cours des hydrocarbures, mais sur le cours de l’aluminium. Le fournisseur, véritable partenaire, contribue à la performance et en partage les résultats.
- A circonstances exceptionnelles, prix exceptionnels ! Plutôt que de contractualiser un mécanisme incrémental (haussier) qui risque de s’installer durablement, mieux vaut convenir d’un complément séparé, provisoire. Fragmenter la tarification complexifie certes la comptabilité, mais facilite grandement le retour à la normale une fois le fait générateur disparu. Qui oserait encore facturer un «supplément COVID» en 2023 ?
Le tour de magie révélé
Et pour ne plus tomber dans le panneau, voici révélé le tour de magie. Une formule de révision de prix est en effet une diversion sophistiquée. Le vendeur illusionniste détourne notre attention sur l’indice, la variable, quand notre obsession devrait se focaliser sur les coefficients. Car l’efficacité qu’ils reflètent se retrouve figée par l’équation à sa valeur initiale.
Accepter une formule de révision des prix, c’est se satisfaire de la productivité d’hier, c’est se résigner à un niveau de performance déjà obsolète, c’est renoncer aux espoirs de progrès et de sobriété de demain. Une capitulation. Une infamie !